IMPORTANCE DE L'AMOUR
UN PONT D'AFFINITE DE PERFECTION
L'Amour est sans doute l'un des thèmes les plus fédérateurs.
Tous les Hommes (ou presque) le revendiquent comme étant un fondement et un pilier de leur système de pensée (Religion, Philosophie..).
Peu hélas l'appliquent pleinement envers Dieu, encore moins envers leur prochain (surtout si ce prochain est d'un autre système de pensée), et vraiment trop peu envers la nature !
Beaucoup parmi les Hommes se disputent l'Amour avec des "Mon Dieu est plus Amour que ton Dieu dur ou sévère" / "Au moins le mien il aime de manière inconditionnelle alors que le tien nananère...".
Le plus triste ou le plus amusant, c'est que souvent ceux qui se disputent la propriété de l'Amour le font avec des tonalités un peu haineuses... tout en revendiquant incarner l'Amour voire même en posséder le monopole !! :-)
Retenons simplement que l'Amour "met tellement les gens d'accord" qu'il représente un large pont d'affinité où les gens doivent se rejoindre pour comprendre et vivre la finalité commune et le sens premier de leur existence et de leur création et de leur vie.
DE QUOI PARLE-T-ON ?
Dans un sens très large, l’amour peut être considéré comme un attachement à une personne ou à une chose, ainsi qu’un moyen permettant d’établir un lien entre deux réalités.
L’être ou la chose aimée permet de combler une imperfection et un manque ressenti par la personne qui aime. L’amour est donc indissociable de l’action : si une personne aime l’argent, elle sera conduite à agir en conséquence pour combler un manque qu’elle ressent en elle, tandis que l’amour envers une personne vient combler un besoin d’affection.
L’amour d’une chose est en réalité l’amour de son propre perfectionnement , puis en second lieu seulement celui de la réalité qui permet ce perfectionnement. Ainsi, nous "aimons" la nourriture car cette dernière est en adéquation avec notre système physiologique et nous permet de rester en vie. De même, l’homme n’aime pas l’argent ou la célébrité en tant que tel, mais seulement en tant que moyens servant à ce qu’il considère être son perfectionnement.
Nous arrivons ici à une définition plus précise : l’amour est une relation existentielle et une attraction entre deux êtres dont l’un est à la source du perfectionnement de l’autre. Plus précisément encore, l’amour est un attachement et une attirance entre un être et sa propre perfection. Dans ce sens, des plantes qui s’orientent vers le soleil ressemblent à l’Homme en quête de savoir, l’amour est une réalité qui habite l’ensemble des êtres du monde.
POINT D'AFFINITE ENTRE PLUSIEURS SYSTEMES DE PENSEE
Sur ce thème de l'Amour, nous avons trouvé des points d'affinité entre plusieurs systèmes de pensée :
. Le Christianisme
. L'Islam
. Le Bouddhisme
. L'Hindouisme
CHRISTIANISME
La place centrale de l’amour dans le christianisme est connue et fondée sur la vie et les paroles du Christ : l’amour est le seul vrai commandement évangélique.
Au légiste qui le questionne sur le commandement le plus important la Loi – il s’agit ici de la Loi mosaïque, donc en fait l’Ancien Testament tout entier – Jésus répond : "Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit : voilà le plus grand et le premier commandement. Le second lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. À ces deux commandements se rattache toute la Loi, ainsi que les Prophètes" (Matthieu 22, 36-41). Par cette réponse Jésus réunit les deux Testaments dans la continuité d’un seul message, l’amour. L’amour est donc non seulement au plein centre du christianisme, mais il est aussi le devoir et le devenir de l’humanité.
Si Jésus a exprimé au légiste d’une façon magistrale ce que Dieu attend de l’homme, maintes autres événements de sa vie illustrent non seulement l’amour concret envers ceux en détresse, mais ils soulignent les implications du "commandement de l’amour". Au Pharisien qui invite Jésus à manger et chez qui une femme s’introduit, une pécheresse connue, qui oint les pieds de Jésus d’un parfum dispendieux et les lave de ses larmes, Jésus répond lorsque son hôte passe un jugement – intérieur – sur Jésus à cause du geste de la femme : "Tu vois cette femme ? dit-il à Simon. Je suis entré dans ta maison, et tu ne m’as pas versé d’eau sur les pieds ; elle, au contraire, m’a arrosé les pieds de ses larmes et les a essuyés avec ses cheveux. Tu ne m’as pas donné de baiser ; elle, au contraire, depuis que je suis entré, n’a cessé de me couvrir les pieds de baisers. Tu n’as pas répandu d’huile sur ma tête ; elle, au contraire, a répandu du parfum sur mes pieds. A cause de cela, je te le dis, ses péchés, ses nombreux péchés, lui sont remis parce qu’elle a montré beaucoup d’amour" (Luc 7, 44-47).
L’enseignement de Jésus sur l’amour pose une exigence des plus difficiles pour les hommes, qui ont l’habitude de faire des distinctions dans l’amour : aimer celui-ci ou celle-là, ne pas aimer un autre, détester ou haïr un autre. Ce n’est pas la nature de l’Amour divin ; Dieu aime tous et toutes, toute sa Création.
L’exigence la plus terrible de Jésus est celle de l’amour des ennemis : "Vous avez entendu qu'il a été dit : Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi. Eh bien ! moi je vous dis : Aimez vos ennemis, et priez pour vos persécuteurs, afin de devenir fils de votre Père qui est aux cieux" (Matthieu 5, 43-45) ; et encore : "Je vous le dis, à vous qui m'écoutez : Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, bénissez ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous diffament. A qui te frappe sur une joue, présente encore l'autre ; à qui t'enlève ton manteau, ne refuse pas ta tunique. A quiconque te demande, donne, et à qui t'enlève ton bien, ne le réclame pas. Ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le pour eux pareillement. Que si vous aimez ceux qui vous aiment, quel gré vous en saura-t-on ? Car même les pécheurs aiment ceux qui les aiment. Et si vous faites du bien à ceux qui vous en font, quel gré vous en saura-t-on ? Même les pécheurs en font autant. Et si vous prêtez à ceux dont vous espérez recevoir, quel gré vous en saura-t-on ? Même des pécheurs prêtent à des pécheurs afin de recevoir l'équivalent. Au contraire, aimez vos ennemis, faites du bien et prêtez sans rien attendre en retour. Votre récompense alors sera grande, et vous serez les fils du Très-Haut, car il est bon, Lui, pour les ingrats et les méchants. Montrez-vous compatissants, comme votre Père est compatissant. Ne jugez pas, et vous ne serez pas jugés ; ne condamnez pas, et vous ne serez pas condamnés ; remettez, et il vous sera remis. Donnez, et l'on vous donnera ; c'est une bonne mesure, tassée, secouée, débordante, qu'on versera dans votre sein ; car de la mesure dont vous mesurez on mesurera pour vous en retour" (Luc 6, 27-38).
Lors de son discours à la Dernière Cène avec ses Apôtres, Jésus revient encore et encore sur le thème de l’amour ; l’amour de l’homme pour ses frères et ses sœurs est un reflet de l’amour de Dieu pour les hommes : "Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez en mon amour… Voici quel est mon commandement : vous aimer les uns les autres comme je vous ai aimés… Nul n’a plus grand amour que celui-ci : donner sa vie pour ses amis… Ce que je vous commande, c’est de vous aimer les uns les autres" (Jean 15, 9-17).
Selon Paul : "Si je n’ai pas d’amour je ne suis rien. L'amour est patient, il est plein de bonté ; l'amour n'est point envieux, il ne se vante point, il ne s'enfle pas d'orgueil. Il ne fait rien de malhonnête. Il ne cherche point son intérêt, il ne s'irrite point, il ne soupçonne point le mal. Il ne se réjouit point de l'injustice, mais il se réjouit de la vérité. Il excuse tout, il croit tout, il espère tout, il supporte tout. L'amour ne meurt jamais".
L'amour dont parle le christianisme se nomme parfois charité, terme qui le distingue de l'amour érotique ou d'amitié. Il ne dépend pas du sentiment, mais de la volonté en lien avec l'intelligence.
Le Pape Benoît XVI a expliqué : "Ce n'est que dans la vérité que l'amour resplendit et qu'il peut être vécu avec authenticité. (...) Dépourvu de vérité, l'amour bascule dans le sentimentalisme. (...) Il est alors la proie des émotions et de l'opinion contingente des êtres humains ; il devient un terme galvaudé et déformé jusqu'à signifier son contraire. La vérité libère l'amour des étroitesses de l'émotivité qui le prive de contenus relationnels et sociaux, et d'un fidéisme qui le prive d'un souffle humain et universel".
Le Pape François, en conclusion de son message pour la Journée mondiale de la paix 2014, a souligné que l'amour se traduit par la fraternité, qui est "fondement et route pour la paix", qui est avec la liberté et l'égalité, l'une des trois vertus républicaines fondatrices de la conception contemporaine des droits de l'homme, comme l'a souligné Jean-Paul II dans une homélie lors de son premier voyage en France en 1980.
ISLAM
Amour et Dieu d’Amour dans le Coran
. La notion d’amour est évoquée dans de nombreux versets coraniques, au travers d’un vaste champ lexical de termes exprimant avec des nuances parfois très subtiles une même idée d’attachement et d’affection entre deux êtres ou réalités. Le Coran souligne que l’amour est d’abord un attribut divin (Sourate 11, 90 "Mon Seigneur est vraiment Miséricordieux et plein d’amour (Wadoud)"
. Cet amour, dont l’une des conséquences est la miséricorde qui lui est associée, constitue le fondement du lien unissant Dieu à l’homme et le but de la religion (Sourate 19, 96 "A ceux qui croient et font de bonnes œuvres, le Tout-Miséricordieux accordera Son amour (wudd)" ; Sourate 3, 31 "Si vous aimez vraiment Dieu, suivez-moi, Dieu vous aimera alors et vous pardonnera vos péchés")
. En outre, le Coran souligne que Dieu fait aimer la foi aux croyants, foi qui n’est autre que ce lien profond les unissant et indissociable d’une relation d’amour (Sourate 49, 7 "Dieu vous a fait aimer la foi et l’a embellie dans vos cœurs et vous a fait détester la mécréance, la perversité et la désobéissance". L’amour est donc une caractéristique des croyants (Sourate 2, 165 "Les croyants sont les plus ardents en l’amour de Dieu"). Outre ces versets citant directement la notion d’amour, de nombreuses autres parties du Coran évoquent l’existence d’une proximité intense de Dieu avec les croyants, qui présupposent l’existence d’un lien d’affection profond (Sourate 2, 186 "Et quand Mes serviteurs t’interrogent sur Moi, alors Je suis tout proche : Je réponds à l’appel de celui qui M'invoque quand il M'invoque".
. Cet amour ne se limite pas à un lien unissant Dieu aux hommes, mais s’étend à l’ensemble de la création, notamment aux époux (Sourate 30, 21 "Il a mis entre vous de l’affection et de la miséricorde"). L’affection entre un mari et sa femme est donc un don de Dieu, et se situe à la base de leur relation. Selon la vision coranique, le monde est la manifestation de l’ensemble des noms divins selon différents degrés d’intensité : tout amour présent sur cette terre est donc une manifestation – consciente ou inconsciente - de l’amour divin.
"Dieu est Amour" dans l'Islam, est exprimé à travers des Noms de Dieu qui détaillent les facettes (ou les composantes) de cet Amour.
Les noms de Dieu liés à l'Amour sont les suivants :
RAHMAN (traduit par "Tout Miséricordieux") / amour-matrice de toutes les amours
. La racine "Rahma" suggère un amour, peut-on dire, "enveloppant" puisque la matrice (maternelle : Rahm) dérive de la même racine. Un Soufi explique le sens : "Celui qui a pour ses créatures des entrailles de mère ! Un amour protecteur, nourricier, délicat qui assure les subsides existentiels"
. Rahman est cité 57 fois dans le Coran (3*19)
RAHIM (traduit par "Très Miséricordieux")
. Rahim est lié au rapport qu'entretient le Créateur avec chacune de ses créatures : Il restaure l'âme, pardonne les péchés, sauve du désespoir, opère -en somme- au niveau de nos failles et défaillances
. Rahim est cité 95 fois dans le Coran (5*19)
Dieu et l'être humain liés par un pacte d'amour
. Si l'être humain est parfois qualifié d'inique, vis à vis de soi-même, c'est parce qu'il oublie que seul Le Rahman peut le faire accéder à la félicité car son règne est amour ; et s'il est traité parfois d'ignorant c'est parce qu'il oublie également que Le Rahim lui pardonne chaque fois qu'il se repent, et ce afin de lui permettre de retourner dans le règne d'amour.
WADOUD (Affectueux et enraciné dans l'amour)
. La racine signifie demeurer constamment en quelque chose. Le dérivé wadd désigne le pieu, l'attache solide, tout ce qui se fixe en terre.
. Wadoud est souvent associé à deux autres noms de Dieu : Rahman et Ghafour (Celui qui pardonne le péché en le couvrant). Cet amour indéracinable, en quelque sorte, est le privilège de ceux qui témoignent d'une foi constante et qui accomplissent les meilleures œuvres
. Mawadda, un autre dérivé, décrit le sentiment amoureux par lequel Dieu unit les époux, lequel sentiment -bien médité- finit par conduire l'esprit à la Source d'amour et à son Créateur : Sourate 30, 21 "Et c’en est un autre que d’avoir créé de vous et pour vous des épouses afin que vous trouviez auprès d’elles votre quiétude, et d’avoir suscité entre elles et vous affection et tendresse. En vérité, il y a en cela des signes certains pour ceux qui raisonnent"
RAOUF (Porté à la commisération)
. Dieu a semé ce sentiment dans le cœur des disciples de Jésus. Il se qualifie Lui-même de Raouf, c'est-à-dire porté à la commisération. Et cet attribut, considéré comme l'un des noms de Dieu, est jumelé toujours dans le Coran, à part deux fois où il est cité seul, d'un autre nom celui de Rahim
. Le Prophète Muhammad, à l'échelle humaine, est décrit avec cet attribut dans le Coran, Sourate 9, 128 "Un Prophète, issu de vous-mêmes, est venu vers vous ! Il compatit à ce que vous endurez et il est plein de sollicitude pour vous, car il est plein de commisération et de compassion (raouf et rahim) pour les croyants"
RABB et BARR (Seigneur et Bienveillant)
. Barr (Bienveillant). Considéré comme attribut, le terme barr désigne, chez les humains, des qualités de cœur dont les premiers bénéficiaires sont les parents ; vertu pratiquée, d'après le Coran, par Jean (Sourate 19, 14 "il était plein de piété filiale -barr- pour ses parents et il n’était ni violent ni désobéissant") et Jésus (Sourate 19, 32 "ainsi que d’être bon -barr- envers ma mère, et Il n’a point fait de moi un être violent ni méchant").
. Cet amour est donc semblable à ce que les enfants éprouvent pour leurs parents, tendresse protectrice, empreinte de gratitude et de reconnaissance. Il ne saurait pas se réduire à des rites, mais englobe la foi et les actes (aide aux nécessiteux, don purificatoire, respect de la parole donnée, constance face à l'adversité) et prend toute son ampleur lorsqu'on fait don de ce qu'on aime le plus, c'est à dire le meilleur de son avoir et de son être (Sourate 2, 177 "la piété -barr-, c’est croire en Dieu, au Jugement dernier, aux anges, aux Livres et aux prophètes ; la piété -barr-, c’est donner de son bien – quelque attachement qu’on lui porte – aux proches, aux orphelins, aux indigents, aux voyageurs et aux mendiants ; la piété -barr-, c’est aussi racheter les captifs, accomplir la prière, s’acquitter de l'aumône légale, demeurer fidèle à ses engagements, se montrer patient dans l’adversité, dans le malheur et face au péril. Telles sont les vertus qui caractérisent les croyants pieux et sincères !").
QOUT, RAZIQ et RAZZAQ (Nourricier)
. Qout signifie, entre autre, "nourrir". Elle donne Muqit, Le Nourricier, un des attributs de Dieu. Il s'agit de subsistance, de subsides existentiels. Le Prophète Muhammad dit dans ce sens "Je passe la nuit auprès de mon Seigneur. Il me nourrit et me désaltère".
. La racine Rizq signifie, d'après l'usage qui en est fait dans le Coran, les nourritures terrestres et célestes à la fois. Les premières, offertes par Dieu et consommées en son Nom, confirment une importante réalité : "l'indissociabilité" de la chair (la constitution naturelle) et de l'esprit.
. De cette racine dérivent les deux noms de Dieu : Raziq (qui assure la subsistance) et Razzaq (qui ne cesse de pourvoir).
. Dans le récit coranique évoquant la retraite de Marie, nous sommes ainsi fondé de trouver au mot rizq les deux sens : extérieur et intérieur (nourriture du corps et de l'esprit). Chaque fois que Zacharie entre dans le Temple, où elle se recueille, il trouve auprès d'elle du "rizq". Etonné -puisqu'il est le seul à l'approcher- il lui en demande la provenance. Elle répond : "Cela vient de Dieu. Dieu pourvoit (yarzuqu) aux besoins de qui Il veut sans compter " (Sourate 3, 37).
D'autres Noms de Dieu mentionnés dans le Coran représentent des facettes ou des composantes de l'amour Divin, comme par exemple :
. WAKEEL (l'amour prise en charge)
. WAHHAB, KARIM (l'amour don infini, l'amour prodigalité)
. Très nombreux sont également les attributs ou les verbes représentant des facettes de l'Amour Divin, tels que amour / bonté / miséricorde / clémence / compassion / mansuétude / indulgence / miséricorde.
Amour divin inconditionnel ou inconditionnel ?
C'est Dieu qui fait aimer la foi et la rend attirante aux cœurs : Sourate 49, 7-8 "... Dieu vous a fait aimer la foi qu’Il a embellie dans vos cœurs, tandis qu’Il vous a fait détester l’impiété, la perversité et la désobéissance. Ce sont ceux-là les bien-guidés / par la grâce et la générosité de Dieu, car Dieu est Omniscient et Sage".
Mais si cet amour est une pure grâce à l'origine, sa germination dépend de l'accueil que l'être humain lui réserve et de l'usage qu'il en fait, puisqu'il est spécifié que :
. Dieu aime : les bienfaisants, les repentants, ceux qui se purifient, ceux qui respectent l'ordre de la création, les patients, ceux qui s'appuient sur Lui, les équitables, ceux qui luttent sur sa voie...
. Dieu n'aime pas : les agresseurs, les dénégateurs pécheurs, les injustes, les fiers orgueilleux, les traîtres, les corrupteurs, les prodigues, les superbes exultants...
Amour prééternel vs Aversion divine
L’amour de Dieu pour Sa création, étant son propre mobile, ne saurait être contingent ou accidentel. Il est un amour préexistant et éternel.
La notion d’amour "prééternel" se heurte en apparence à celle de l’aversion divine attestée dans les textes. Un certain nombre de Hadiths emploie en effet les termes de détestation ou d’aversion concernant Dieu : Dieu n’aime pas ceci ou cela ; ou Dieu n’aime pas telle catégorie de personnes. En réponse à ce paradoxe, voila la définition que Fakhr ad-Dîn ar-Râzî donne de l’aversion en question : "l’aversion, chez Dieu, se rapporte à sa Volonté de ne pas laisser une chose demeurer dans sa non-manifestation ou privation essentielle".
C’est également l’avis d’Ibn ‘Arabî : "Dieu dit au sujet des catégories d’êtres qu’Il aime : 'Dieu aime ceux qui se repentent' ; 'Dieu aime ceux qui se purifient'… et, à l’inverse, Il se défend d’aimer certaines catégories d’homme en raison de caractéristiques qui les définissent et qu’Il n’aime pas. En somme, ce qu’indique implicitement Son discours est qu’Il aime voir disparaître ces caractéristiques. Or elles ne peuvent disparaître que par leur contraire".
Séparation, Attachement puis Retour vers Dieu
Séparation
Le mots utilisé pour évoquer la notion de création est Falaq qui signifie séparation. Ainsi, à l'instar de la naissance d'un enfant qui se matérialise par une séparation du corps maternel, la Création serait une forme de séparation d'avec Dieu.
Attachement
La création de l'Homme en particulier est décrite aussi par le terme AALAQ (l'amour attachement, dépendance, adhérence) :
. AALAQ est employé à diverses reprises dans le Coran, surtout dans la première révélation faite au Prophète Muhammad : Sourate 96, 2 "Lis au nom de ton Seigneur qui créa, créa l'être humain de Aalaq -adhérence, attachement-"
. Lire le sens de l'existence à la lumière de cette réalité où le propre de l'être humain est d'être pendu à..., dépendant de ..., attaché à..., c'est rappeler un état amoureux où le cœur est comme "suspendu" à l'être aimé ! Il s'agit d'un attachement tellement fort, qu'il constitue l'entité de l'être humain. En somme, si l'on perd ses attaches avec Dieu, l'humanité et le cosmos, c'est comme si l'on n'existait plus ! Le cœur bat pour s'attacher, et notre vie ne retrouve son vrai goût que si on parvient à maintenir cette relation d'attachement originelle :
Le plus noble d'entre les Humains est, aux yeux de Dieu, celui qui se garde de fausser l'ordre de la création, et cet ordre c'est précisément l'amour !
Retour à (vers) Dieu
Et à la fin, le retour vers Dieu s'opère....
. Sourate 2, 156 "Nous sommes à Dieu et c’est à Lui que nous ferons retour !"
. Sourate 2, 285 "Pardonne-nous, Seigneur, car c’est vers Toi que tout doit faire retour !"
BOUDDHISME
Dans les bouddhismes Mahayana et Vajrayana (bouddhismes vietnamiens, chan, zen, lamaïsme), l'Amour est l'une des quatre qualités d'être que le pratiquant doit développer, l'un des "Quatre Infinis" ou "Quatre Incommensurables" : l'amour, la compassion, la joie et l'équanimité. Les tibétains définissent l'amour comme un souhait du bonheur de l'autre ; la compassion, comme un souhait de cessation de la souffrance de l'autre ; la joie, comme une participation à son bonheur ; l'équanimité comme le fait d'être attentif de façon semblable à tout être et toute chose sans établir un attachement privilégié.
Tout pratiquant du bouddhisme Mahayana doit souhaiter la "bodhichitta" - "l'esprit d'éveil" - : souhaiter obtenir l'éveil ou les qualités spirituelles pour le bien des êtres, et ultimement, libérer définitivement les souffrances humaines. Karuna (sansk.), est traduit par "compassion" en français et "loving-kindness" en anglais, une activité d'attention aimante envers l'autre. Au Tibet, la compassion est décrite comme l'attitude de la mère attentive envers à ses enfants.
Dans le bouddhisme Mahayana, d'une façon générale, la compassion, ou "amour-tendresse" est à développer conjointement à la sagesse (compréhension de la nature réelle, objective des phénomènes, philosophie du non-soi, etc.).
La sagesse permet de s'affranchir de l'idée du soi, donc de toute tendance égotique ou narcissique. En cela, elle participe à l'émergence d'une "compassion infinie".
De même, la sagesse exige une grande compassion pour être actualisée : l'extinction de l'illusion du soi, pour les bouddhistes, exige une infinie dévotion, une immense abnégation.
Aussi, pour les bouddhistes du Tibet, sagesse et compassion (ou « amour-tendresse ») se développent l'un l'autre jusqu'à conduire le pratiquant dans une "Terre pure" de bodhisattva - c'est-à-dire jusqu'à l'actualisation du potentiel humain d'amour, de joie, de compassion et d'équanimité.
Dans le bouddhisme ancien, selon l'enseignement du Bouddha, cette vision de l'amour n'apparaît pas. Le Bouddha insiste surtout sur le détachement qui conduit à la suppression du désir, et donc au bonheur durable (cessation de la souffrance, nirvana). Ce n'est qu'entre les Ier et IVe siècles ap. J.-C. qu’émergera le bouddhisme Mahayana pour lequel l’action de compassion et d’amour envers l’autre prime sur l’ascèse et la méditation.
Pour les bouddhismes issus des développements du Mahayana et du Vajrayana, amour, joie et compassion ne sont pas des émotions mais de véritables qualités d'êtres.
Les émotions telles la colère, la jalousie, la peur, l'avidité, l'orgueil, passion, ne sauraient durer, elles sont passagères et proviennent de l'attachement et du désir.
Au contraire, l'amour, la joie et la compassion peuvent se développer infiniment et sans être nécessairement dépendantes d'un objet ou de la présence d'un être.
Le pratiquant peut les porter en lui, les développer infiniment et au-delà de tout attachement.
HINDOUISME
Selon Vivekananda, maître spirituel de l'hindouisme, l'amour de Dieu (bhakti en sanskrit) est le véritable amour, non égoïste : "Nous ne pourrons concevoir une jouissance plus haute que l’amour, mais ce mot amour a différentes significations. Il ne signifie pas l’amour égoïste qui est courant dans le monde ; (...) l’amour qui est parfaitement sans égoïsme est le seul amour, et c’est celui de Dieu. Il est très difficile à atteindre. Nous passons à travers toutes ces amours différentes, amour des enfants, du père, de la mère, etc. Nous développons lentement notre faculté d’amour, mais dans la majorité des cas, nous n’apprenons rien, nous nous enchaînons à un stade, à une personne".
L'Amour est sans doute l'un des thèmes les plus fédérateurs.
Tous les Hommes (ou presque) le revendiquent comme étant un fondement et un pilier de leur système de pensée (Religion, Philosophie..).
Peu hélas l'appliquent pleinement envers Dieu, encore moins envers leur prochain (surtout si ce prochain est d'un autre système de pensée), et vraiment trop peu envers la nature !
Beaucoup parmi les Hommes se disputent l'Amour avec des "Mon Dieu est plus Amour que ton Dieu dur ou sévère" / "Au moins le mien il aime de manière inconditionnelle alors que le tien nananère...".
Le plus triste ou le plus amusant, c'est que souvent ceux qui se disputent la propriété de l'Amour le font avec des tonalités un peu haineuses... tout en revendiquant incarner l'Amour voire même en posséder le monopole !! :-)
Retenons simplement que l'Amour "met tellement les gens d'accord" qu'il représente un large pont d'affinité où les gens doivent se rejoindre pour comprendre et vivre la finalité commune et le sens premier de leur existence et de leur création et de leur vie.
DE QUOI PARLE-T-ON ?
Dans un sens très large, l’amour peut être considéré comme un attachement à une personne ou à une chose, ainsi qu’un moyen permettant d’établir un lien entre deux réalités.
L’être ou la chose aimée permet de combler une imperfection et un manque ressenti par la personne qui aime. L’amour est donc indissociable de l’action : si une personne aime l’argent, elle sera conduite à agir en conséquence pour combler un manque qu’elle ressent en elle, tandis que l’amour envers une personne vient combler un besoin d’affection.
L’amour d’une chose est en réalité l’amour de son propre perfectionnement , puis en second lieu seulement celui de la réalité qui permet ce perfectionnement. Ainsi, nous "aimons" la nourriture car cette dernière est en adéquation avec notre système physiologique et nous permet de rester en vie. De même, l’homme n’aime pas l’argent ou la célébrité en tant que tel, mais seulement en tant que moyens servant à ce qu’il considère être son perfectionnement.
Nous arrivons ici à une définition plus précise : l’amour est une relation existentielle et une attraction entre deux êtres dont l’un est à la source du perfectionnement de l’autre. Plus précisément encore, l’amour est un attachement et une attirance entre un être et sa propre perfection. Dans ce sens, des plantes qui s’orientent vers le soleil ressemblent à l’Homme en quête de savoir, l’amour est une réalité qui habite l’ensemble des êtres du monde.
POINT D'AFFINITE ENTRE PLUSIEURS SYSTEMES DE PENSEE
Sur ce thème de l'Amour, nous avons trouvé des points d'affinité entre plusieurs systèmes de pensée :
. Le Christianisme
. L'Islam
. Le Bouddhisme
. L'Hindouisme
CHRISTIANISME
La place centrale de l’amour dans le christianisme est connue et fondée sur la vie et les paroles du Christ : l’amour est le seul vrai commandement évangélique.
Au légiste qui le questionne sur le commandement le plus important la Loi – il s’agit ici de la Loi mosaïque, donc en fait l’Ancien Testament tout entier – Jésus répond : "Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit : voilà le plus grand et le premier commandement. Le second lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. À ces deux commandements se rattache toute la Loi, ainsi que les Prophètes" (Matthieu 22, 36-41). Par cette réponse Jésus réunit les deux Testaments dans la continuité d’un seul message, l’amour. L’amour est donc non seulement au plein centre du christianisme, mais il est aussi le devoir et le devenir de l’humanité.
Si Jésus a exprimé au légiste d’une façon magistrale ce que Dieu attend de l’homme, maintes autres événements de sa vie illustrent non seulement l’amour concret envers ceux en détresse, mais ils soulignent les implications du "commandement de l’amour". Au Pharisien qui invite Jésus à manger et chez qui une femme s’introduit, une pécheresse connue, qui oint les pieds de Jésus d’un parfum dispendieux et les lave de ses larmes, Jésus répond lorsque son hôte passe un jugement – intérieur – sur Jésus à cause du geste de la femme : "Tu vois cette femme ? dit-il à Simon. Je suis entré dans ta maison, et tu ne m’as pas versé d’eau sur les pieds ; elle, au contraire, m’a arrosé les pieds de ses larmes et les a essuyés avec ses cheveux. Tu ne m’as pas donné de baiser ; elle, au contraire, depuis que je suis entré, n’a cessé de me couvrir les pieds de baisers. Tu n’as pas répandu d’huile sur ma tête ; elle, au contraire, a répandu du parfum sur mes pieds. A cause de cela, je te le dis, ses péchés, ses nombreux péchés, lui sont remis parce qu’elle a montré beaucoup d’amour" (Luc 7, 44-47).
L’enseignement de Jésus sur l’amour pose une exigence des plus difficiles pour les hommes, qui ont l’habitude de faire des distinctions dans l’amour : aimer celui-ci ou celle-là, ne pas aimer un autre, détester ou haïr un autre. Ce n’est pas la nature de l’Amour divin ; Dieu aime tous et toutes, toute sa Création.
L’exigence la plus terrible de Jésus est celle de l’amour des ennemis : "Vous avez entendu qu'il a été dit : Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi. Eh bien ! moi je vous dis : Aimez vos ennemis, et priez pour vos persécuteurs, afin de devenir fils de votre Père qui est aux cieux" (Matthieu 5, 43-45) ; et encore : "Je vous le dis, à vous qui m'écoutez : Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, bénissez ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous diffament. A qui te frappe sur une joue, présente encore l'autre ; à qui t'enlève ton manteau, ne refuse pas ta tunique. A quiconque te demande, donne, et à qui t'enlève ton bien, ne le réclame pas. Ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le pour eux pareillement. Que si vous aimez ceux qui vous aiment, quel gré vous en saura-t-on ? Car même les pécheurs aiment ceux qui les aiment. Et si vous faites du bien à ceux qui vous en font, quel gré vous en saura-t-on ? Même les pécheurs en font autant. Et si vous prêtez à ceux dont vous espérez recevoir, quel gré vous en saura-t-on ? Même des pécheurs prêtent à des pécheurs afin de recevoir l'équivalent. Au contraire, aimez vos ennemis, faites du bien et prêtez sans rien attendre en retour. Votre récompense alors sera grande, et vous serez les fils du Très-Haut, car il est bon, Lui, pour les ingrats et les méchants. Montrez-vous compatissants, comme votre Père est compatissant. Ne jugez pas, et vous ne serez pas jugés ; ne condamnez pas, et vous ne serez pas condamnés ; remettez, et il vous sera remis. Donnez, et l'on vous donnera ; c'est une bonne mesure, tassée, secouée, débordante, qu'on versera dans votre sein ; car de la mesure dont vous mesurez on mesurera pour vous en retour" (Luc 6, 27-38).
Lors de son discours à la Dernière Cène avec ses Apôtres, Jésus revient encore et encore sur le thème de l’amour ; l’amour de l’homme pour ses frères et ses sœurs est un reflet de l’amour de Dieu pour les hommes : "Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez en mon amour… Voici quel est mon commandement : vous aimer les uns les autres comme je vous ai aimés… Nul n’a plus grand amour que celui-ci : donner sa vie pour ses amis… Ce que je vous commande, c’est de vous aimer les uns les autres" (Jean 15, 9-17).
Selon Paul : "Si je n’ai pas d’amour je ne suis rien. L'amour est patient, il est plein de bonté ; l'amour n'est point envieux, il ne se vante point, il ne s'enfle pas d'orgueil. Il ne fait rien de malhonnête. Il ne cherche point son intérêt, il ne s'irrite point, il ne soupçonne point le mal. Il ne se réjouit point de l'injustice, mais il se réjouit de la vérité. Il excuse tout, il croit tout, il espère tout, il supporte tout. L'amour ne meurt jamais".
L'amour dont parle le christianisme se nomme parfois charité, terme qui le distingue de l'amour érotique ou d'amitié. Il ne dépend pas du sentiment, mais de la volonté en lien avec l'intelligence.
Le Pape Benoît XVI a expliqué : "Ce n'est que dans la vérité que l'amour resplendit et qu'il peut être vécu avec authenticité. (...) Dépourvu de vérité, l'amour bascule dans le sentimentalisme. (...) Il est alors la proie des émotions et de l'opinion contingente des êtres humains ; il devient un terme galvaudé et déformé jusqu'à signifier son contraire. La vérité libère l'amour des étroitesses de l'émotivité qui le prive de contenus relationnels et sociaux, et d'un fidéisme qui le prive d'un souffle humain et universel".
Le Pape François, en conclusion de son message pour la Journée mondiale de la paix 2014, a souligné que l'amour se traduit par la fraternité, qui est "fondement et route pour la paix", qui est avec la liberté et l'égalité, l'une des trois vertus républicaines fondatrices de la conception contemporaine des droits de l'homme, comme l'a souligné Jean-Paul II dans une homélie lors de son premier voyage en France en 1980.
ISLAM
Amour et Dieu d’Amour dans le Coran
. La notion d’amour est évoquée dans de nombreux versets coraniques, au travers d’un vaste champ lexical de termes exprimant avec des nuances parfois très subtiles une même idée d’attachement et d’affection entre deux êtres ou réalités. Le Coran souligne que l’amour est d’abord un attribut divin (Sourate 11, 90 "Mon Seigneur est vraiment Miséricordieux et plein d’amour (Wadoud)"
. Cet amour, dont l’une des conséquences est la miséricorde qui lui est associée, constitue le fondement du lien unissant Dieu à l’homme et le but de la religion (Sourate 19, 96 "A ceux qui croient et font de bonnes œuvres, le Tout-Miséricordieux accordera Son amour (wudd)" ; Sourate 3, 31 "Si vous aimez vraiment Dieu, suivez-moi, Dieu vous aimera alors et vous pardonnera vos péchés")
. En outre, le Coran souligne que Dieu fait aimer la foi aux croyants, foi qui n’est autre que ce lien profond les unissant et indissociable d’une relation d’amour (Sourate 49, 7 "Dieu vous a fait aimer la foi et l’a embellie dans vos cœurs et vous a fait détester la mécréance, la perversité et la désobéissance". L’amour est donc une caractéristique des croyants (Sourate 2, 165 "Les croyants sont les plus ardents en l’amour de Dieu"). Outre ces versets citant directement la notion d’amour, de nombreuses autres parties du Coran évoquent l’existence d’une proximité intense de Dieu avec les croyants, qui présupposent l’existence d’un lien d’affection profond (Sourate 2, 186 "Et quand Mes serviteurs t’interrogent sur Moi, alors Je suis tout proche : Je réponds à l’appel de celui qui M'invoque quand il M'invoque".
. Cet amour ne se limite pas à un lien unissant Dieu aux hommes, mais s’étend à l’ensemble de la création, notamment aux époux (Sourate 30, 21 "Il a mis entre vous de l’affection et de la miséricorde"). L’affection entre un mari et sa femme est donc un don de Dieu, et se situe à la base de leur relation. Selon la vision coranique, le monde est la manifestation de l’ensemble des noms divins selon différents degrés d’intensité : tout amour présent sur cette terre est donc une manifestation – consciente ou inconsciente - de l’amour divin.
"Dieu est Amour" dans l'Islam, est exprimé à travers des Noms de Dieu qui détaillent les facettes (ou les composantes) de cet Amour.
Les noms de Dieu liés à l'Amour sont les suivants :
RAHMAN (traduit par "Tout Miséricordieux") / amour-matrice de toutes les amours
. La racine "Rahma" suggère un amour, peut-on dire, "enveloppant" puisque la matrice (maternelle : Rahm) dérive de la même racine. Un Soufi explique le sens : "Celui qui a pour ses créatures des entrailles de mère ! Un amour protecteur, nourricier, délicat qui assure les subsides existentiels"
. Rahman est cité 57 fois dans le Coran (3*19)
RAHIM (traduit par "Très Miséricordieux")
. Rahim est lié au rapport qu'entretient le Créateur avec chacune de ses créatures : Il restaure l'âme, pardonne les péchés, sauve du désespoir, opère -en somme- au niveau de nos failles et défaillances
. Rahim est cité 95 fois dans le Coran (5*19)
Dieu et l'être humain liés par un pacte d'amour
. Si l'être humain est parfois qualifié d'inique, vis à vis de soi-même, c'est parce qu'il oublie que seul Le Rahman peut le faire accéder à la félicité car son règne est amour ; et s'il est traité parfois d'ignorant c'est parce qu'il oublie également que Le Rahim lui pardonne chaque fois qu'il se repent, et ce afin de lui permettre de retourner dans le règne d'amour.
WADOUD (Affectueux et enraciné dans l'amour)
. La racine signifie demeurer constamment en quelque chose. Le dérivé wadd désigne le pieu, l'attache solide, tout ce qui se fixe en terre.
. Wadoud est souvent associé à deux autres noms de Dieu : Rahman et Ghafour (Celui qui pardonne le péché en le couvrant). Cet amour indéracinable, en quelque sorte, est le privilège de ceux qui témoignent d'une foi constante et qui accomplissent les meilleures œuvres
. Mawadda, un autre dérivé, décrit le sentiment amoureux par lequel Dieu unit les époux, lequel sentiment -bien médité- finit par conduire l'esprit à la Source d'amour et à son Créateur : Sourate 30, 21 "Et c’en est un autre que d’avoir créé de vous et pour vous des épouses afin que vous trouviez auprès d’elles votre quiétude, et d’avoir suscité entre elles et vous affection et tendresse. En vérité, il y a en cela des signes certains pour ceux qui raisonnent"
RAOUF (Porté à la commisération)
. Dieu a semé ce sentiment dans le cœur des disciples de Jésus. Il se qualifie Lui-même de Raouf, c'est-à-dire porté à la commisération. Et cet attribut, considéré comme l'un des noms de Dieu, est jumelé toujours dans le Coran, à part deux fois où il est cité seul, d'un autre nom celui de Rahim
. Le Prophète Muhammad, à l'échelle humaine, est décrit avec cet attribut dans le Coran, Sourate 9, 128 "Un Prophète, issu de vous-mêmes, est venu vers vous ! Il compatit à ce que vous endurez et il est plein de sollicitude pour vous, car il est plein de commisération et de compassion (raouf et rahim) pour les croyants"
RABB et BARR (Seigneur et Bienveillant)
. Barr (Bienveillant). Considéré comme attribut, le terme barr désigne, chez les humains, des qualités de cœur dont les premiers bénéficiaires sont les parents ; vertu pratiquée, d'après le Coran, par Jean (Sourate 19, 14 "il était plein de piété filiale -barr- pour ses parents et il n’était ni violent ni désobéissant") et Jésus (Sourate 19, 32 "ainsi que d’être bon -barr- envers ma mère, et Il n’a point fait de moi un être violent ni méchant").
. Cet amour est donc semblable à ce que les enfants éprouvent pour leurs parents, tendresse protectrice, empreinte de gratitude et de reconnaissance. Il ne saurait pas se réduire à des rites, mais englobe la foi et les actes (aide aux nécessiteux, don purificatoire, respect de la parole donnée, constance face à l'adversité) et prend toute son ampleur lorsqu'on fait don de ce qu'on aime le plus, c'est à dire le meilleur de son avoir et de son être (Sourate 2, 177 "la piété -barr-, c’est croire en Dieu, au Jugement dernier, aux anges, aux Livres et aux prophètes ; la piété -barr-, c’est donner de son bien – quelque attachement qu’on lui porte – aux proches, aux orphelins, aux indigents, aux voyageurs et aux mendiants ; la piété -barr-, c’est aussi racheter les captifs, accomplir la prière, s’acquitter de l'aumône légale, demeurer fidèle à ses engagements, se montrer patient dans l’adversité, dans le malheur et face au péril. Telles sont les vertus qui caractérisent les croyants pieux et sincères !").
QOUT, RAZIQ et RAZZAQ (Nourricier)
. Qout signifie, entre autre, "nourrir". Elle donne Muqit, Le Nourricier, un des attributs de Dieu. Il s'agit de subsistance, de subsides existentiels. Le Prophète Muhammad dit dans ce sens "Je passe la nuit auprès de mon Seigneur. Il me nourrit et me désaltère".
. La racine Rizq signifie, d'après l'usage qui en est fait dans le Coran, les nourritures terrestres et célestes à la fois. Les premières, offertes par Dieu et consommées en son Nom, confirment une importante réalité : "l'indissociabilité" de la chair (la constitution naturelle) et de l'esprit.
. De cette racine dérivent les deux noms de Dieu : Raziq (qui assure la subsistance) et Razzaq (qui ne cesse de pourvoir).
. Dans le récit coranique évoquant la retraite de Marie, nous sommes ainsi fondé de trouver au mot rizq les deux sens : extérieur et intérieur (nourriture du corps et de l'esprit). Chaque fois que Zacharie entre dans le Temple, où elle se recueille, il trouve auprès d'elle du "rizq". Etonné -puisqu'il est le seul à l'approcher- il lui en demande la provenance. Elle répond : "Cela vient de Dieu. Dieu pourvoit (yarzuqu) aux besoins de qui Il veut sans compter " (Sourate 3, 37).
D'autres Noms de Dieu mentionnés dans le Coran représentent des facettes ou des composantes de l'amour Divin, comme par exemple :
. WAKEEL (l'amour prise en charge)
. WAHHAB, KARIM (l'amour don infini, l'amour prodigalité)
. Très nombreux sont également les attributs ou les verbes représentant des facettes de l'Amour Divin, tels que amour / bonté / miséricorde / clémence / compassion / mansuétude / indulgence / miséricorde.
Amour divin inconditionnel ou inconditionnel ?
C'est Dieu qui fait aimer la foi et la rend attirante aux cœurs : Sourate 49, 7-8 "... Dieu vous a fait aimer la foi qu’Il a embellie dans vos cœurs, tandis qu’Il vous a fait détester l’impiété, la perversité et la désobéissance. Ce sont ceux-là les bien-guidés / par la grâce et la générosité de Dieu, car Dieu est Omniscient et Sage".
Mais si cet amour est une pure grâce à l'origine, sa germination dépend de l'accueil que l'être humain lui réserve et de l'usage qu'il en fait, puisqu'il est spécifié que :
. Dieu aime : les bienfaisants, les repentants, ceux qui se purifient, ceux qui respectent l'ordre de la création, les patients, ceux qui s'appuient sur Lui, les équitables, ceux qui luttent sur sa voie...
. Dieu n'aime pas : les agresseurs, les dénégateurs pécheurs, les injustes, les fiers orgueilleux, les traîtres, les corrupteurs, les prodigues, les superbes exultants...
Amour prééternel vs Aversion divine
L’amour de Dieu pour Sa création, étant son propre mobile, ne saurait être contingent ou accidentel. Il est un amour préexistant et éternel.
La notion d’amour "prééternel" se heurte en apparence à celle de l’aversion divine attestée dans les textes. Un certain nombre de Hadiths emploie en effet les termes de détestation ou d’aversion concernant Dieu : Dieu n’aime pas ceci ou cela ; ou Dieu n’aime pas telle catégorie de personnes. En réponse à ce paradoxe, voila la définition que Fakhr ad-Dîn ar-Râzî donne de l’aversion en question : "l’aversion, chez Dieu, se rapporte à sa Volonté de ne pas laisser une chose demeurer dans sa non-manifestation ou privation essentielle".
C’est également l’avis d’Ibn ‘Arabî : "Dieu dit au sujet des catégories d’êtres qu’Il aime : 'Dieu aime ceux qui se repentent' ; 'Dieu aime ceux qui se purifient'… et, à l’inverse, Il se défend d’aimer certaines catégories d’homme en raison de caractéristiques qui les définissent et qu’Il n’aime pas. En somme, ce qu’indique implicitement Son discours est qu’Il aime voir disparaître ces caractéristiques. Or elles ne peuvent disparaître que par leur contraire".
Séparation, Attachement puis Retour vers Dieu
Séparation
Le mots utilisé pour évoquer la notion de création est Falaq qui signifie séparation. Ainsi, à l'instar de la naissance d'un enfant qui se matérialise par une séparation du corps maternel, la Création serait une forme de séparation d'avec Dieu.
Attachement
La création de l'Homme en particulier est décrite aussi par le terme AALAQ (l'amour attachement, dépendance, adhérence) :
. AALAQ est employé à diverses reprises dans le Coran, surtout dans la première révélation faite au Prophète Muhammad : Sourate 96, 2 "Lis au nom de ton Seigneur qui créa, créa l'être humain de Aalaq -adhérence, attachement-"
. Lire le sens de l'existence à la lumière de cette réalité où le propre de l'être humain est d'être pendu à..., dépendant de ..., attaché à..., c'est rappeler un état amoureux où le cœur est comme "suspendu" à l'être aimé ! Il s'agit d'un attachement tellement fort, qu'il constitue l'entité de l'être humain. En somme, si l'on perd ses attaches avec Dieu, l'humanité et le cosmos, c'est comme si l'on n'existait plus ! Le cœur bat pour s'attacher, et notre vie ne retrouve son vrai goût que si on parvient à maintenir cette relation d'attachement originelle :
Le plus noble d'entre les Humains est, aux yeux de Dieu, celui qui se garde de fausser l'ordre de la création, et cet ordre c'est précisément l'amour !
Retour à (vers) Dieu
Et à la fin, le retour vers Dieu s'opère....
. Sourate 2, 156 "Nous sommes à Dieu et c’est à Lui que nous ferons retour !"
. Sourate 2, 285 "Pardonne-nous, Seigneur, car c’est vers Toi que tout doit faire retour !"
BOUDDHISME
Dans les bouddhismes Mahayana et Vajrayana (bouddhismes vietnamiens, chan, zen, lamaïsme), l'Amour est l'une des quatre qualités d'être que le pratiquant doit développer, l'un des "Quatre Infinis" ou "Quatre Incommensurables" : l'amour, la compassion, la joie et l'équanimité. Les tibétains définissent l'amour comme un souhait du bonheur de l'autre ; la compassion, comme un souhait de cessation de la souffrance de l'autre ; la joie, comme une participation à son bonheur ; l'équanimité comme le fait d'être attentif de façon semblable à tout être et toute chose sans établir un attachement privilégié.
Tout pratiquant du bouddhisme Mahayana doit souhaiter la "bodhichitta" - "l'esprit d'éveil" - : souhaiter obtenir l'éveil ou les qualités spirituelles pour le bien des êtres, et ultimement, libérer définitivement les souffrances humaines. Karuna (sansk.), est traduit par "compassion" en français et "loving-kindness" en anglais, une activité d'attention aimante envers l'autre. Au Tibet, la compassion est décrite comme l'attitude de la mère attentive envers à ses enfants.
Dans le bouddhisme Mahayana, d'une façon générale, la compassion, ou "amour-tendresse" est à développer conjointement à la sagesse (compréhension de la nature réelle, objective des phénomènes, philosophie du non-soi, etc.).
La sagesse permet de s'affranchir de l'idée du soi, donc de toute tendance égotique ou narcissique. En cela, elle participe à l'émergence d'une "compassion infinie".
De même, la sagesse exige une grande compassion pour être actualisée : l'extinction de l'illusion du soi, pour les bouddhistes, exige une infinie dévotion, une immense abnégation.
Aussi, pour les bouddhistes du Tibet, sagesse et compassion (ou « amour-tendresse ») se développent l'un l'autre jusqu'à conduire le pratiquant dans une "Terre pure" de bodhisattva - c'est-à-dire jusqu'à l'actualisation du potentiel humain d'amour, de joie, de compassion et d'équanimité.
Dans le bouddhisme ancien, selon l'enseignement du Bouddha, cette vision de l'amour n'apparaît pas. Le Bouddha insiste surtout sur le détachement qui conduit à la suppression du désir, et donc au bonheur durable (cessation de la souffrance, nirvana). Ce n'est qu'entre les Ier et IVe siècles ap. J.-C. qu’émergera le bouddhisme Mahayana pour lequel l’action de compassion et d’amour envers l’autre prime sur l’ascèse et la méditation.
Pour les bouddhismes issus des développements du Mahayana et du Vajrayana, amour, joie et compassion ne sont pas des émotions mais de véritables qualités d'êtres.
Les émotions telles la colère, la jalousie, la peur, l'avidité, l'orgueil, passion, ne sauraient durer, elles sont passagères et proviennent de l'attachement et du désir.
Au contraire, l'amour, la joie et la compassion peuvent se développer infiniment et sans être nécessairement dépendantes d'un objet ou de la présence d'un être.
Le pratiquant peut les porter en lui, les développer infiniment et au-delà de tout attachement.
HINDOUISME
Selon Vivekananda, maître spirituel de l'hindouisme, l'amour de Dieu (bhakti en sanskrit) est le véritable amour, non égoïste : "Nous ne pourrons concevoir une jouissance plus haute que l’amour, mais ce mot amour a différentes significations. Il ne signifie pas l’amour égoïste qui est courant dans le monde ; (...) l’amour qui est parfaitement sans égoïsme est le seul amour, et c’est celui de Dieu. Il est très difficile à atteindre. Nous passons à travers toutes ces amours différentes, amour des enfants, du père, de la mère, etc. Nous développons lentement notre faculté d’amour, mais dans la majorité des cas, nous n’apprenons rien, nous nous enchaînons à un stade, à une personne".